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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/231

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il contait à ma mère qu’en sa jeunesse, il s’était débauché pendant quelques troubles de la France ; et avait servi de goujat à un cadet d’une compagnie de l’infanterie. Or, puisqu’il faisait service à un homme qui en faisait au roi, il n’y a personne qui ne puisse nier qu’il n’en fît à Sa Majesté. Qui plus est, il n’a pas tenu à lui qu’il n’ait été capitaine, voire même général d’armée ; et les hommes ne doivent point être blâmés pour n’être pas parvenus à ces grandeurs, n’étant pas favorisés de la fortune.

Le villageois s’accorda à servir de témoin en l’affaire d’Hortensius, incité par les bonnes raisons. Le pédant anobli, la première fois qu’il vit Frémonde, sut d’elle qu’elle se trouverait un certain jour en une maison qu’elle lui enseigna, où il lui pourrait dire tout ce qu’il aurait envie. Il s’y trouva à l’heure assignée avec le villageois, et son cuistre de surplus, auquel il avait commandé de se tenir toujours derrière lui, et lorsqu’il nombrerait à quelqu’un tout ce qu’il avait, pour prendre hardiment la parole et faire les choses plus grandes qu’elles n’étaient, afin que d’un côté l’on le jugea extrêmement à son aise, et que d’un autre l’on le prit pour un homme très modeste et sans vanité, qui dit encore moins qu’il n’avait.

Frémonde était en cette maison avec celle qui en était la maîtresse, et qui l’avait accompagnée au collège. Son feint cousin y était encore parce qu’elle disait que c’était à lui qu’elle voulait parler de la recherche d’Hortensius avant que son père en eût des nouvelles. Davantage il y avait deux braves hommes très propres à cette