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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/232

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conférence. Notre pédant entretient premièrement sa maîtresse de discours d’amour, suivant sa coutume, et comme il voit qu’elle le somme de ses promesses, et veut savoir en outre s’il a assez de bien pour la maintenir en l’état de damoiselle, il se met à discourir tout haut de ses moyens avec une impertinence la plus grande du monde.

— Monsieur, dit-il en s’adressant particulièrement au cousin, qui avait mis le nez dans leur communication, afin que vous ne pensiez point que je sois un homme de paille, sachez que j’ai fait acquisition en ma patrie d’une maison qui vaut deux mille écus.

Le cuistre, qui était derrière sa chaise, va dire incontinent, selon ses préceptes : « Elle en vaut bien quatre mille, monsieur. »

— Hoy ! dit Hortensius en se retournant, vous faut-il reprendre votre maître ? Quand je dirais une bourde, le devriez-vous pas tenir pour une vérité ? De surplus, reprit-il, j’ai une constitution de rente de trois mille livres au denier seize sur une personne grandement solvable.

— Elle est bien de six mille livres, dit le cuistre incontinent, j’ai vu la grosse de votre contrat.

— Ne veux-tu pas te taire, encore une fois, coquin ? répond Hortensius.

— Mais, monsieur, réplique le cuistre, il faut bien que je vous fasse souvenir de ce que vous oubliez.

Là-dessus, la maîtresse du logis dit à Hortensius que le bruit courait qu’il avait quelques infirmités, et que, s’il était ainsi, elle ne conseillait à Frémonde de l’épouser.