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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/233

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— Ce sont des malveillants qui vous ont fait ce rapport, lui répondit-il ; je suis ici près d’une personne à laquelle je ne veux non plus mentir que si j’étais devant la même divinité : je jure donc que je n’ai d’autre ulcère en tout mon corps que celui qu’un cautère me fait à la jambe gauche.

Le cuistre, croyant qu’il fallût aussi multiplier ceci, dit : « Vous en avez un pareillement à la jambe droite. »

Alors Hortensius se leva de sa chaire pour frapper son valet et le punir de son indiscrétion ; mais l’on le retint, et le cuistre crut que sa colère était feinte comme l’autre fois et se délibéra de bien faire encore son office à la première occasion.

— Monsieur, dit alors Frémonde à Hortensius, nous avons pu colliger, tant de votre dire que de votre serviteur, que vous aviez vaillant dix-huit-mille livres ; mais, d’un autre côté, nous avons su de gens dignes de foi que vous en avez bien dix mille, dont vous avez emprunté une partie pour aider à l’achat de votre maison et l’autre pour vous assister en quelques nécessités.

— Ceux qui vous ont dit cela, reprit Hortensius, ne vous ont pas dit la vérité.

— Vous me pardonnerez, répond Frémonde ; si vous voulez que nous vous tenions pour un homme franc, vous ne nierez pas une chose qui nous est apparente.

Alors, ne voulant pas démentir sa maîtresse, et s’imaginant que c’était assez de lui assurer qu’il était riche de huit mille francs, il lui dit : « Puisque vous voulez que je vous l’accorde, je vous dis que j’ai fait une dette de dix mille livres.