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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/25

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V

s’amusent à parler d’un nombre infini de choses vaines qui ont été dites beaucoup de fois et ne pénètrent point jusqu’au centre de la vérité ; pour moi, j’essaie d’aborder par un chemin droit au souverain bien et une vertu solide. Les autres n’ont garde d’y arriver si tôt que moi, car ils vont comme en dansant par diverses figures et se rendront si las qu’ils tomberont de faiblesse à moitié chemin ; au lieu que je ne fais que m’avancer en marchant d’un pas ferme et d’un train qui n’est point diverti. Si je ne parle pour cet ouvrage-ci principalement, je parle pour d’autres dont j’ai les desseins plus sérieux. Ce n’est point ici une présomption ; je ne me vante de rien que je ne puisse infailliblement exécuter, comme l’on pourra voir quelque jour. S’il semble à quelqu’un que j’ai donné une manière de défi de me surpasser à ceux qui se mêlent d’écrire, je ne me soucierai guère de lui ôter cette opinion ; car il m’est avis que, faisant profession de garder religieusement les statuts de la noblesse, je pourrais appeler si je voulais mes adversaires au combat de la plume, ainsi qu’un chevalier en appelle un autre au combat de l’épée. On ne témoigne pas une vanité présomptueuse plutôt en l’un qu’en l’autre en se promettant la victoire.

Le plus grand divertissement que j’aie à donner ici, afin de montrer avec quelle injustice l’on me blâmera, c’est qu’il s’est omis en cette impression plus de fautes qu’en pas une que l’on ait jamais vue. C’est bien pour me faire enrager, et le lecteur aussi, qui aura sans doute beaucoup de peine à expliquer plusieurs passages où il y a des mots qui ne me sont jamais venus en la pensée et où l’on en a oublié d’autres. Les imprimeurs, se souvenant de leur nom, ont mis bestes au lieu de pestes, en d’autres endroits avant toict pour aucun toict, couche pour cruche, faux furon pour fanfaron, maistres pour monstres,