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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/30

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avait enseigné la pratique de ces superstitions lui avait défendu d’en user en cette occasion et lui avait appris à dire quelques paroles pour se défendre de tous les assauts que les mauvais esprits lui pourraient livrer. Le désir passionné qu’il avait de parachever son entreprise, lui faisant mépriser toute sorte de considérations, le contraignit à la fin de se mettre à genoux dedans le cercle vers l’occident.

— Vous démons qui présidez sur la concupiscence, qui nous emplissez de désirs charnels à votre gré et qui nous donnez les moyens de les accomplir, ce dit-il d’une voix assez haute, je vous conjure par l’extrême pouvoir de qui vous dépendez et vous prie de m’assister en tout et partout, et spécialement de me donner la même vigueur pour les embrassements qu’un homme peut avoir à trente-cinq ans ou environ. Si vous le faites, je vous donnerai une telle récompense, que vous vous contenterez de moi.

Ayant dit cela, il appela par plusieurs fois Asmodée, et puis il se tut en attendant ce qui arriverait. Un bruit s’éleva en un endroit un peu éloigné ; il ouït des hurlements de voix, des cailloux qui se choquaient l’un contre l’autre et un tintamarre qui se faisait comme si l’on eût frappé contre les branches des arbres. Ce fut alors que l’horreur se glissa tout à fait dans son âme, et j’ose bien jurer qu’il eût voulu être à sa maison et n’avoir point entrepris de si périlleuses affaires. Son seul recours fut de dire ces paroles ridicules, qu’il avait apprises pour sa défense :

— Oh ! qui que tu sois, grand mâtin qui accours à moi