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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/341

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sée à accorder de toutes les vôtres ? Est-ce la chanterellewkt ?

— Nenni-da, Madame, ce dis-je, c’est la plus grosse : je suis quelque fois plus de deux heures sans en pouvoir venir à bout. Néanmoins, je m’assure que, si vous l’aviez seulement touchée du doigt elle se banderait toute seule autant qu’il le faut. Quand vous voudrez vous en verrez l’expérience ; elle rendra une harmonie qui vous ravira les esprits jusqu’au ciel, j’entends le ciel de votre lit.

L’on entendit bien de quelle corde je voulais parler, et les risées que l’on fit invitèrent de plus en plus la bourgeoise à chercher les moyens de me donner quelque bon trait, pour avoir sa revanche.

— Je veux bien un autre musicien que vous, dit-elle. Il m’est facile à juger que vous ne faites rien qui vaille puisque vous ne sauriez quelquefois accorder votre instrument sans le secours d’autrui.

— Par la vertugoy ! lui répondis-je, je n’en suis pas à dépriser pour cela, j’ai la volonté fort bonne. » Puis, sans donner à mes paroles une double signification, je continuai ainsi : « Je ne sais de quelle humeur je suis : le violon ne me plaît point, encore que ce soit mon gagne pain. Je voudrais avoir un instrument qui fût tout d’une pièce ou au moins qui eût ses parties si bien collées ensemble, que toutes n’en fissent qu’une. Celui-ci veut avoir un certain nombre de chevilles qui ne doivent point tenir dedans leurs trous : cela m’ennuie. Une flûte me serait plus agréable ; elle a des trous tout aussi bien et si, l’on n’y boute point de chevilles. Vous ressemblez à mon rebec, vous autres femmes ; voilà pourquoi votre