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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/391

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Francion, l’ayant remercié de sa courtoisie, se mit à parler de Collinet, et dit qu’il faisait bien autant d’estime de lui que d’un tas d’hommes qui se glorifiaient, s’estimant très savants, et avaient plus de folie en leur esprit qu’il n’en avait au sien.

— Ce que l’on prend ordinairement pour la plus grande sagesse du monde, n’est rien que sottise, erreur et manque de jugement ; je le ferai voir lorsqu’il en sera besoin. Même nous autres, qui croyons avoir bien employé le temps que nous avons passé à l’amour, aux festins, aux mômeries, nous nous trouverons à la fin trompés ; nous verrons que nous sommes des fous. Les maladies nous affligeront et la débilité des membres nous viendra avant que nous soyons en l’âge caduc.

— Quittons ce propos-là, je vous supplie, dit Raymond ; je ne suis pas en humeur d’entendre des prédications, je ne sais pas si vous êtes en humeur d’en faire.

Ayant achevé ces paroles, il alla recevoir beaucoup de braves hommes des villes et des bourgades de là à l’entour, qu’il avait fait prier de venir dîner chez lui, avec quelques belles femmes, un peu plus chastes que celles qui étaient déjà venues, lesquelles descendirent en la salle toutes habillées. Et Francion, leur ayant demandé quelle était celle d’entre eux qui avait montré ses fesses, regarda bien s’il n’y en avait point quelqu’une qui rougît, afin de la reconnaître. Mais il n’y en eut pas une qui tînt une contenance plus honteuse qu’une autre : celle de qui il parlait avait prié ses compagnes de ne la point découvrir. Ainsi cela fut encore caché.

Un peu après, l’on vint dresser une longue table qui