Aller au contenu

Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/403

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
377

se donnaient pour exemple ; si bien qu’elles ne se retournèrent pas aussi chastes qu’elles étaient venues. Raymond avait cessé le combat du verre, il y avait longtemps pour aller folâtrer avec les femmes ; lesquelles il contraignait quelquefois de mettre les mains en quelqu’endroit des plus secrets de son corps, et ne parlait d’autre chose que de foutre. Ce que Francion entendant lui dit :

— Comte de Raymond, pardieu, je vous blâme, et tous ceux qui ont ces mots à la bouche.

— Pourquoi mon brave ? dit le comte. Y a-t-il du mal à prendre la hardiesse de parler des choses que nous prenons bien la hardiesse de faire ? Me voulez-vous dire que ces dames aiment mieux que l’on le leur fasse par le bas du ventre, que par les oreilles, ou bien croyez-vous que cette chose soit si sacrée et si vénérable, que l’on n’en doive pas parler à tout propos ?

— Ce n’est point cela, répondit Francion, il vous est permis d’en discourir et de nommer toutes les parties sans scandale ; mais je voudrais que ce fût par des noms plus beaux et moins communs que vous leur baillez. Il y a bien de l’apparence que les plus braves hommes, quand ils veulent témoigner leur galantise, usent en cette matière-ci, la plus excellente de toutes, des propres termes qui sortent à chaque moment de la bouche des crocheteurs, des laquais et de tous les coquins du monde, lesquels n’ont point de paroles plus à commandement. Pour moi, j’enrage quand je vois quelquefois qu’un poète pense avoir fait un bon sonnet, quand il a mis dedans ces mots de foutre, de vit et de con. Voilà, pensez-vous des embellissements bien plus grands que