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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/408

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avait là bon moyen de l’attirer dans ses filets. Je ne sais si elle se sera mise en devoir de s’y trouver ; mais si elle le fait, elle y perdra ses peines, parce que Floriandre est mort depuis quelque temps. Je lui en ai écrit des nouvelles ; c’est à savoir si elle les recevra, et si elle ne sera point déjà partie lorsqu’elles seront à sa demeure ordinaire. Il faudra que je m’en retourne bientôt pour l’aller consoler en quelque lieu qu’elle soit.

— Ha ! je vous assure, dit alors Francion, que je veux l’aller trouver en lieu qu’elle puisse être ; une si rare beauté mérite bien que je fasse un voyage pour la voir. J’ai toujours aimé les femmes aimables que j’ai aperçues et celles dont j’ai ouï seulement parler. Il ne faut pas maintenant que je déroge à ma nouvelle humeur. Au reste, il y a longtemps que j’ai désir de voir l’Italie ce beau jardin du monde ; j’aurai une belle occasion d’y voyager. Premièrement, je m’en irai aux eaux pour tâcher d’y rencontrer Naïs. Et vous, Dorini, ne voulez-vous pas prendre ce même chemin avec moi ?

— Si vous pensez trouver Naïs aux eaux, répondit Dorini, il faut que vous partiez dès demain et que vous fassiez une extrême diligence. Or je voudrais bien demeurer ici un mois environ ; c’est pourquoi je ne saurais vous accompagner. Je vous retrouverai en Italie où vous vous en retournerez avec Naïs, qui sera sans doute éprise de votre mérite aussitôt qu’elle vous aura vu. Au reste, n’était qu’elle a le portrait de son défunt amant, je vous conseillerais de prendre son nom pour quelque peu de jours, au commencement que vous seriez avec elle.

— Je ne pourrais pas me résoudre à cela, repartit