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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/432

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gentilhomme qui lui était redevable était tout prêt à le payer, et qu’il s’en vînt le voir promptement. Le marchand venu, le souper fut mis sur la table, et il fallut qu’il s’assît avec les sergents pour manger comme les autres ; car l’on remit le payement après le repas. Lui et ses camarades burent d’autant, de sorte que les fumées commençaient à leur monter au cerveau. Francion donne à un laquais d’une certaine poudre qu’il avait apportée parmi ses autres curiosités, laquelle, étant mêlée parmi le vin qu’ils burent tout le dernier, les rendit tellement assoupis, qu’il semblait qu’ils eussent plutôt une âme de brute qu’une âme d’homme. Leurs paroles n’avaient plus aucune raison, et l’on leur faisait tout ce que l’on voulait et sans qu’ils y songeassent seulement. Francion, les voyant dans cet état, fouille dans leurs pochettes, prend les promesses que le marchand avait apportées et les requêtes et les décrets de prise de corps, que les sergents avaient, puis il brûle tout devant du Buisson, qui lui fait mille remerciements du plaisir qu’il reçoit de lui.

Là-dessus, Francion appelle le tavernier et se plaint à lui de ce qu’il leur a baillé du vin tellement brouillé, que ces pauvres gens de ville qui n’étaient pas accoutumés à boire, comme ceux de sa troupe, s’étaient enivrés, encore qu’ils n’eussent pas bu davantage que les autres.

— Ce sont des galants, monsieur, répondit-il, pour le moins ces deux sergents que vous voyez. Ils étaient déjà à demi ivres quand vous les avez fait mettre à table avec vous. Ne savez-vous pas bien que, quand vous êtes entrés, ils faisaient carroussewkt ensemble ? Il faut envoyer