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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/45

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bien fait l’hypocrite ; à qui se fiera-t-on désormais ?

— Trédame, hé ! ce que je dis n’est-il pas vrai ? reprit Catherine. Et que serait-ce donc si je vous avais montré par effet que je suis même fournie de la chose dont vous avez le plus de besoin, et que Valentin ne peut pas mieux que moi vous rendre contente ? Vous auriez bien de l’étonnement.

— Vraiment, voilà de beaux discours pour une fille, dit Laurette. Allez, ma mie, vous êtes la plus effrontée du monde, ou vous vous êtes énivrée ce soir ; retirez-vous, que je ne vous voie plus. Que c’est une chose fâcheuse d’avoir des servantes. Mais quoi, c’est un mal nécessaire.

Catherine qui était entrée en humeur, ne se souciant pas de l’opinion que sa maîtresse pourrait avoir d’elle, s’en approcha pour la baiser et lui faire voir, après, qu’elle ne s’était vantée d’aucune chose qu’elle n’eût le moyen d’accomplir. Elle s’imaginait qu’aussitôt que Laurette aurait savouré la douceur de ses embrassements elle concevrait de la bienveillance pour elle et ne chercherait que les moyens de la pouvoir souvent tenir entre ses bras. Mais Laurette, sachant bien ce qu’elle savait faire, l’empêcha de parvenir au bout de ses desseins et la poussa hors de sa chambre, en lui donnant deux ou trois coups de poing et lui disant forces injures.

Tout leur discours avait été entendu d’Olivier, qui sortit de la ruelle et dit à Laurette qu’elle avait bien pu connaître, par les paroles et par les actions de Catherine, qu’elle n’était pas ce qu’elle lui avait toujours semblé. Laurette, reconnaissant cette vérité apparente, lui dit qu’elle voulait mettre ordre à cette affaire-là ; qu’elle