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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/84

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sant être auprès de Laurette. Il lui répondit qu’il voulait passer tout le reste de la nuit à dormir, et que, le lendemain, il lui conterait le plus plaisant songe qu’il eût ouï jamais.

Agathe éteignit donc la chandelle, s’en retournant dans son lit, et les laissa jusques au jour suivant, qu’ils se levèrent tous trois à pareille heure. Le gentilhomme, sachant que Francion était venu dans une charrette, lui offrit une autre commodité et lui conseilla de la renvoyer ; ce qu’il fit, priant le charretier de ne dire à personne où il l’avait mené. Ayant fait déjeuner Agathe en leur compagnie, le gentilhomme lui demanda en secret d’où elle venait et où elle allait. Elle dit qu’elle venait de Paris et qu’elle allait voir Laurette, afin d’essayer ses bonnes grâces pour un financier qui était infiniment amoureux d’elle.

— L’espoir du gain te fait faire cela ? dit le gentilhomme.

— Oui, monsieur, répondit-elle.

— Si une autre personne que le financier t’en promet un plus grand, tu l’assisteras bien plutôt. Je te prie donc de faire en sorte que tu amènes Laurette à mon château pour voir son Francion qu’elle chérit beaucoup, comme tu pourras savoir d’elle. Si tu fais cela, je te rendrai la plus contente du monde ; et ne te soucie, nous ferons alors fête entière. Sois seulement secrète maintenant et ne découvre point qui je suis.

Agathe promit à celui qui parlait à elle de faire de la fausse monnaie pour lui s’il était besoin, et après s’en retourna vers Francion, à qui elle parla de ces amours de Laurette.