Page:Sorel - La Vraie histoire comique de Francion.djvu/301

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vouloit avoir raison de lui en brave cavalier, il étoit prêt de sortir à la campagne pour le combattre. Mais ses habillemens n’étoient point dans sa chambre, et, qui plus est, l’on lui dit qu’on avoit charge d’empêcher qu’il ne sortît. Il fut donc contraint de se tenir encore au lit jusqu’au jour suivant, que le maître d’hôtel vint dès le matin le voir avec un valet de chambre de Raymond, qui lui dit qu’il lui venoit aider à se vêtir. Francion répondit qu’il n’en devoit point prendre la peine et qu’il n’avoit qu’à faire venir son homme. Mais l’on lui répliqua que Raymond ne vouloit pas qu’il parlât à lui.







LIVRE HUITIÈME



Les aventures que Francion a courues en sa plus basse jeunesse, et celles qu’il a eues, ont été mises dans les livres précédens, où je l’ai toujours fait parler de la sorte qu’il les a racontées. Il est temps que son historien parle lui-même et dise le reste tout de suite. Je le veux faire aussi sans me soucier de qui que ce soit, puisque je l’ai entrepris ; et il suffit que je donne là-dessus un avertissement particulier. C’est que je n’ai point trouvé de remède plus aisé ni plus salutaire à l’ennui qui m’affligeoit il y a quelque temps que de m’amuser à décrire une histoire qui tînt davantage du folâtre que du sérieux ; de manière qu’une triste cause a produit un facétieux effet. Or je ne crois pas qu’il y ait des personnes si sottes que de me blâmer de cette occupation, vu que les plus beaux esprits que l’on ait jamais vus ont bien daigné s’y adonner, et qu’il y a des temps auxquels notre vie nous sembleroit bien ennuyeuse, si nous ne nous servions d’un divertissement semblable. C’est être hypocondriaque de s’imaginer que celui qui fait profession de vertu ne doit point prendre de récréation. Fasse qui voudra l’Héraclite du siècle ; pour moi, j’aime mieux en être le Démocrite, et je veux que les plus importantes affaires de la terre ne me servent plus que