Page:Sorel - La Vraie histoire comique de Francion.djvu/318

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au-dessus de laquelle il y avoit un flambeau, il lui troussa la cotte par derrière, et lui baisa les fesses, où il y avoit une petite marque noire, qu’il n’eut pas sitôt aperçue qu’il lui dit : Ah ! Thérèse, vous avez bien fait la dissimulée. C’est donc vous que nous avons trouvée ce matin toute nue ; votre signe me l’a fait connoître. Incontinent il alla dire à tout le monde de quelle façon il avoit appris où étoient les fesses à qui l’on avoit rendu hommage, et chacun en rit à bon escient. Thérèse, qui ne se fâchoit de rien, dit avec une humeur qui appartenoit bien au lieu où elle étoit : Eh bien, vous avez vu mes fesses, qu’en est-il ? Les voulez-vous voir encore ? Je ne serai pas chiche de vous les montrer ; qui est-ce qui est le plus digne d’être moqué, de vous ou de moi ? Je les ai tantôt montrées par force, et vous les avez baisées de votre bon gré.

Ce discours étant quitté, Raymond, qui se plaisoit fort au combat du verre, fit apporter des meilleurs vins du monde, pour l’égayer avec quelque bons compagnons qui l’avoient défié. Il n’est rien de pareil à ce breuvage, dit-il, il emplit d’une certaine divinité ceux qui l’avalent ; il fait perdre les impressions craintives que l’erreur et la sottise nous avoient données. C’est par son moyen qu’un orateur ne craint point de dire en ses harangues beaucoup de choses piquantes, et qu’un amant découvre son mal avec hardiesse à celle qui l’a causé. Les victoires des combats s’acquièrent ordinairement par ceux qu’il a rendus vaillans. Buvons, buvons éternellement, et souhaitons de mourir comme George, comte de Clarence, qui, se voyant contraint, par le jugement du roi d’Angleterre, de quitter la vie, se fit mettre dans un tonneau plein de vin, dont il but tant qu’il en creva. Venez, Francion : à celui-ci ! Je n’en ferai rien, répondit-il, j’aime mieux user mes forces en me jouant avec Laurette qu’en me jouant avec Bacchus. Si j’en prenois trop, tout mon corps seroit brutalement assoupi, et ne pourroit plus prendre avec les femmes qu’un plaisir lent, et j’ose bien dire douloureux. Eh bien, dit Raymond, chacun est libre ici ; suivez la volupté qui vous est la plus agréable.

Alors il vint des musiciens qui chantèrent beaucoup d’airs nouveaux, joignant le son de leurs luths et de leurs violes à celui de leurs voix. Ah ! dit Francion, ayant la tête penchée dessus le sein de Laurette, après la vue d’une beauté il n’y a