Page:Sorel - Le Berger extravagant, seconde partie, 1627.djvu/82

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guere profonde : mais n’y ayant rien que du gravier et du sable où j’enfonçay mes doigts, je me retiray incontinent. Regardant à lors dans l’eau que j’avois toute troublee, je ne vy plus ma nayade, dont la perte me donna tant de regret que je me couchay par terre comme si j’eusse esté prest à mourir. En fin ma douleur ayant un peu de relasche, et n’ayant pas l’esprit occupé à regarder dans les eaux, je me consideray moy-mesme. O dieux ! Diray-je tout ? Je vy que j’avois une robe de femme, et ayant porté la main à ma teste, je trouvay que j’avois une coiffure pareille à celle de la nayade. Cela me fit recognoistre la tromperie des enchantemens de Zenocrite, et je me doutay bien que le visage que j’avois tant admiré estoit le mien propre que j’avois mesconnu estant deguisé. Je me retournay alors vers la riviere