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Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/251

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épouser Félix. Ce souvenir me fut rendu si soudainement après une si naïve révélation sur la dureté de son cœur, qu’il me glaça. Je devins pâle. Je me sentis si troublée, que je me levai pour sortir. Marianne courut après moi.

« — Je vous ai fâchée, me dit-elle ; ah ! excusez-moi. Voyez-vous, nous sommes si pauvres ! et j’ai eu peur.

« La pauvre femme pleurait, je pleurais aussi. Aujourd’hui que je puis étudier dans mon horrible loisir tout ce qui s’est passé en moi, je ne saurais comment expliquer le désespoir qui me saisit tout à coup ; je me mis à éclater en sanglots, je venais de voir clairement dans mon cœur que jamais je n’aimerais Félix. Était-ce un avertissement que j’allais en aimer un autre ? je ne sais, mais ce moment me révéla tout le malheur de ma vie. Marianne me regardait, elle ne comprenait rien à ma douleur. Que de fois, quand j’étais enfant, j’ai vu de jeunes filles prises de ces soudains désespoirs, et que de fois j’ai entendu