Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/325

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mot de ma bouche : je me sentais mourir, voilà tout. Et j’étais coupable, déshonorée et flétrie que je ne savais pourquoi j’étais coupable, déshonorée et flétrie !

« Ce fut le cri de son bonheur qui m’éveilla de cet engourdissement ; je voulus le repousser et le maudire, mais ma parole demeura étouffée sous ses lèvres, et mes larmes se perdirent dans ses baisers. J’étais à lui ! je pleurai : je venais de perdre une illusion, je venais d’apprendre ce que les hommes appellent le bonheur. Le bonheur ! est-ce donc la profanation de l’amour ? Pauvre ange déchu, je venais de tomber du ciel. Car j’étais un ange, moi ; car si j’eusse été une femme seulement, une femme comme tant d’autres, ou j’aurais résisté, ou j’aurais été heureuse aussi ; mais j’ignorais l’amour des hommes, et j’y succombai.

« Cependant le délire de la joie de Léon me calma, et je laissai mon âme redescendre jusqu’à lui, lorsqu’à genoux devant moi il me dit :