Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/332

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et semblait craindre la responsabilité d’une intelligence avec moi. J’appris un jour qu’un mot de pitié qui lui était échappé lui avait valu la menace de la chasser. « Pauvre demoiselle ! avait-elle dit, elle leur mourra dans les mains sans qu’ils s’en aperçoivent. » Quand cette femme disait cela, elle avait raison : oui, je serais morte si l’on m’avait laissée mourir ; mais on a voulu me tuer, et je me suis défendue ; j’ai résisté, je résiste encore. Combien cela durera-t-il ?

« Cependant le temps se passait, et rien ne venait m’avertir que je n’étais pas abandonnée. Oh ! quels jours et quels nuits de tortures, quels effrois soudains ; et quelles lentes et profondes terreurs ! Si un mot sans intention venait heurter par hasard à ma position, je me sentais défaillir ; puis, dans ma solitude, je me figurais le moment où il faudrait dire la vérité, ou bien celui où la vérité serait découverte, et alors c’étaient, dans mes insomnies, d’effroyables tableaux, où j’étais à genoux, criant et pleurant