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Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/336

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et là, à travers un rideau, je vis M. Lannois, j’entendis son entretien.

« M. Lannois était un homme très-jeune encore ; son visage était joyeux et rouge, sa taille petite et épaisse, sa tournure grotesque et prétentieuse, sa voix aigre et commune. Qu’on ne s’étonne pas si de ce premier moment je le remarquai si bien : c’est que chacun de ses traits dont je viens de le peindre ne m’apparut que pour me glacer le cœur. Oh ! si c’eût été un homme au visage austère et implacable, j’aurais tremblé, j’aurais désespéré aussi, mais pas de ce désespoir honteux qui comprend d’avance que sa prière sera plutôt méconnue que repoussée. On peut s’agenouiller devant la mort, mais il faut se taire devant la face enluminée de la sottise heureuse. Dût la dureté de ces paroles retomber sur moi, je les maintiens ; car, il faut le dire, cet homme me donna le plus extrême de mes malheurs, il ôta sa dignité à ma souffrance, il me fit rougir, non de honte, mais de dégoût.