Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/114

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Quand jadis chaque siècle en prenait une pierre ;
Et ce mont, tout d’orgueil, ce mont que le ciseau
Tailla pour être un homme et qui fut un tombeau ;
Et triomphes vaincus, colonnes renversées,
Et fruit de cendre éclos au champ de nos pensées ;
Et ces dogmes de plomb qui pressaient autrefois
Le sein de l’espérance écrasé sous leur poids ;
Et ces systèmes-sphinx créés pour nous surprendre,
Dévorant l’avenir qui cherche à les comprendre ;
Et ces livres impurs, pages où sans remord
Le génie apposa le cachet de la mort.

Le moule où les fondeurs, attisant leur fournaise,
Coulent les membres lourds de l’Hercule Farnèse,
Et les taureaux de bronze et la bombe aux flancs noirs
Qui creuse en nos Babels de fumants entonnoirs,
Sent bouillonner en lui des chaleurs moins actives
Que l’abîme entr’ouvrant ses rouges perspectives,
Où l’on voit s’allonger, comme les feux des camps,
De plage en plage, au loin, des ligues de volcans.
Sur la pente des monts ardus, bruyante troupe,
Des centaures chasseurs portant une âme en croupe,
Courent lançant des traits ou tendent, inclinés,
De grande filets de fer pour prendre des damnés.
De gros serpents autour des rocs, mouvante écorce,
Font des pics allongés une colonne torse,
Dont les forts chapiteaux, d’un feu vif incrustés,
Montent, foudre immobile, aux cintres dévastés.
Les vautours de l’enfer, famille réprouvée,
Y creusent l’aire ardente où s’endort leur couvée ;
Et de grands pins criant dans leurs convulsions,
Enracinent au sol les malédictions.