Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/129

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Sous les sillons ardents de l’horrible sueur.
Et, d’un œil égaré, l’éclatante victime
Suivait ces gouttes d’or qui pleuvaient dans l’abîme ;
Et depuis trois mille ans pressait son piédestal,
Sans voir diminuer ses membres de métal.
Effrayé de ses maux autant que du prodige,
« — Quel crime à ce tourment t’a condamné ? lui dis-je :
« Réponds comme si Dante en ce lieu te parlait ! —
Et sous l’or bouillonnant dont son corps ruisselait,
Le damné répondit : — « Mon crime fut sordide ;
« De mon éternité la torture splendide
« En est le juste emblème… Un juif magicien,
« N’approchant pas d’un Dieu qui n’était pas le sien,
« Eut besoin, pour son art, de l’hostie adorée
« Où s’enferme le Christ, quand elle est consacrée :
« Moi, je servais Jésus, et j’offris, pour de l’or,
« De vendre à l’étranger le mystique trésor.
« Comme pour me nourrir de ce pain redoutable,
« J’allai m’agenouiller à la très-sainte table ;
« Et, dérobé par moi, le radieux froment
« Passa du tabernacle aux mains du nécromant.
« Puis, sans me souvenir de la main qui châtie,
« J’enfermai sous clef l’or dont il paya l’hostie.

« Mauvaise heure !… Deux jours après ma trahison,
« Je vis le feu du ciel tomber sur ma maison ;
« J’accourus espérant retrouver dans la poudre,
« L’or maudit à travers ces débris de la foudre,
« Il reluisait auprès d’un berceau sillonné :
« Le tonnerre en tombant s’en était détourné,
« Il n’avait consumé que mon fils….. En silence
« Je mis tous mes ducats, au fond d’une balance,