Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/262

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Et qui tous les cent ans ouvre une fleur nouvelle.

Je charmais son regret lentement endormi ;
Mais près de Sémida j’avais un ennemi,
Un étrange ennemi… le lion domestique
Que bénit, en mourant, le vieillard prophétique.
Nul philtre à mon parti n’avait pu l’enchaîner.
Soit que l’esprit du mort sur mon cœur vînt planer,
Soit qu’un instinct rival de la pensée humaine
Contre mon espérance eût allumé sa haine,
Il semblait s’irriter du progrès de nos nœuds ;
Autour de moi, dans l’ombre, il rôdait soupçonneux ;
Et passait tour à tour, gardien de la famille,
Du sépulcre du père aux amours de la fille.
Il osait sur mes sens essayer la terreur ;
Et moi d’un seul regard je brisais sa fureur.
Un jour que j’effeuillais une blanche ketmie
Sur le front transparent de la vierge endormie,
Le lion m’aperçoit de loin, et courroucé,
Se ramasse un moment sous son poil hérissé ;
Puis d’un cri prolongé réveillant mon amante,
Vient droit à moi, terrible et la gueule écumante.
Je le regarde alors…. et lui veut s’affranchir
Du charme dont l’éclair le contraint à fléchir.
Ne pouvant entre nous abaisser sa paupière
Que j’immobilisais ainsi qu’un œil de pierre,
S’indignant, et sentant, lorsque je suis vainqueur,
Qu’en fascinant ses yeux je subjugue son cœur,
Il enfonce sa griffe en leur profonde orbite,
Échappe à mon pouvoir dans une nuit subite,
Et du prestige ardent dénouant les liens,
Désarme mon regard en éteignant les siens.