Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/264

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« Laisse-moi m’avancer seule vers cette rive,
« Où comme un cygne blanc Dieu veut que l’on arrive. »
Elle se tait et pleure, et puis vient à pas lents
De l’aveugle lion laver les yeux sanglants,
Et, chaque jour sa main, devant la sépulture,
A l’animal plaintif apporte sa pâture,
En lui disant… « Hélas ! tu perdis la clarté,
« Pour demeurer fidèle et n’être pas dompté ;
« Et moi dans le regard dont tu fuyais la flamme,
« Je puise imprudemment les vertiges de l’âme.
« Tu n’as jamais veillé près de ton lionceau
« Avec autant d’amour qu’auprès de mon berceau,
« Quand j’étais tout enfant ; maintenant, comme un frère,
« Tu gardes nuit et jour la tombe de moi père ;
« Maintenant des liens de fer pèsent sur toi.
« Oh ! ne réveille pas le vieillard contre moi.
« Je viendrai te servir, et malgré sa faiblesse,
« Ma main allégera la chaîne qui te blesse ;
« Et je te nourrirai des fruits de mon jardin,
« Comme Eve nourrissait les lions dans Éden. »
Et le lion, gardant pour moi toute sa haine,
Léchait la douce main qui soulevait sa chaîne.

*


Autant et plus que lui veillait sur Sémida,
Instrument que David pour les deux accorda,
Trésor miraculeux resté dans sa famille,
Passant, tout constellé, du vieillard à sa fille,
Une harpe mystique, et dont les cordes d’or
Luttèrent autrefois contre l’esprit d’Endor.
A l’ombre des palmiers quand la vierge chrétienne