Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/468

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Un blasphème qui soit le spectre de son âme,
Et ces pensers, plus forts que l’orage et le fer,
Dont un seul lui suffit pour briser Lucifer.
La mort et le péché, gardiens de ses royaumes,
Famille dont Satan lui légua les fantômes,
L’entourent, demandant si l’on va leur livrer
Sur les pas de leur maître un monde à dévorer.

« Viens, dit-il ; me voici debout sous ta colère.
« Mon trône m’a placé plus près de ton tonnerre ;
« Et mon bandeau de roi dont le tien est jaloux,
« Jette assez de rayons pour diriger tes coups.
« Que veux-tu ? manque-t-il quelque anneau de souffrance
« Aux fers qui sur nos bras ont rivé ta vengeance ?
« Viens compter tous nos maux, comme seul et caché
« L’avare compte l’or à ses mains attaché.
« Quand la création, sans demander à naître,
« S’échappa, tout en pleurs, des abîmes de l’être,
« Son hymne universel fut un cri de douleur,
« Montant et descendant des soleils à la fleur.
« Le mal infecta l’air dont s’abreuvaient les mondes,
« Et tu laissas tomber leurs rênes vagabondes.
« Ton ouvrage orphelin de toi fut rejeté,
« Comme un fruit monstrueux qu’une femme a porté.
« Et lorsque je voulus, moi, Dieu par mon génie,
« De mon globe natal retarder l’agonie,
« Et sous un ciel plus doux, un air plus transparent,
« Redonner la jeunesse à mon berceau mourant ;
« Toi, jaloux de mon œuvre et de ma résistance,
« Au disque du soleil tu gravas ma sentence ;
« Tu vainquis Sémida, l’univers a péri.
« Mais pour d’autres combats l’abîme m’a mûri.