Page:Soupé - Études sur la littérature sanscrite.djvu/42

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bizarre aphorisme des Pandits hindous : « qu’un auteur doit se réjouir d’économiser même la moitié d’une voyelle brève autant que de se voir naître un fils. » Jamais Aristote, dans ses formules les plus concises, n’a atteint un pareil idéal de laconisme ; l’algèbre seule saurait aller au-delà. La poésie, la théologie, la science, la jurisprudence dispersées dans les trois sections précédentes des Védas, se condensèrent sous cette forme abrégée et obscure qui était à la fois pour les écoliers indiens un aide-mémoire et un exercice intellectuel. Nous n’entrerons pas dans les détails de ces subtilités, qui se raffinent et s’obscurcissent de plus en plus, de Saunaka à Asvalayana, de Panini à Katyayana, et qui atteignent enfin avec Pingala le plus haut degré possible d’absurdité. Nous sommes là dans l’âge des commentateurs et des grammairiens. L’inspiration a déserté ces derniers représentants de la sagesse primitive pour passer aux sectateurs des doctrines de Çakya-Mouni. Le Védisme, par son extrême décadence, touche au plein épanouissement du Bouddhisme sous le roi Asoka, petit-fils de Tchandra-Goupta.


IV


La littérature védique, dont nous venons de suivre rapidement les destinées, a sa plus riche et sa plus pure expression dans le Rig-Véda. Un rig est une prière à la louange d’un dieu. Les prières, réunies dans le Rig-Véda, sont au nombre de 1, 017 ; on les a classées, soit par lectures accommodées à l’enseignement scolaire, soit par groupes d’écrivains, soit par ordre de sujets : les mètres employés sont fort variés ; il en existe au-delà de trente. Les poètes sont encore bien plus nombreux : on trouve parmi eux des femmes et des prêtres, des rois et des fils de rois, des enfants de dieux et même des dieux ; la plupart, nommés rishis, étaient des