107,389 slôkas ou distiques ; tout distique, pour chacun de ses quatre hémistiches, ayant trente-deux syllabes longues ou brèves à la manière grecque ou latine. Il est vrai que dans cette quantité énorme de vers sont compris les 16,374 slôkas de l’Hârivansa, supplément ajouté postérieurement au Mahâbhârata ; il est vrai aussi que les épisodes, qui y ont été insérés après coup et successivement, sont innombrables. Quelques-uns se rattachent étroitement au sujet : plusieurs remontent à une très-haute antiquité ; d’autres sont plus récents et beaucoup moins utiles. Mais on s’accorde généralement à croire que le centre originaire de l’épopée, autour duquel se sont peu à peu accumulés et agglomérés tant de détails plus ou moins superflus, comme des excroissances parasites sur un tronc d’arbre séculaire, représenterait seulement la somme de quarante à cinquante mille vers. Ce sont là encore des dimensions fort respectables, si l’on songe que l’Énéide n’en a environ que dix mille, l’Odyssée douze mille, l’Iliade quinze mille, le poëme sur Alexandre le Grand par les trouvères Lambert le Court et Alexandre de Bernay, un des romans rimes du moyen âge les plus étendus, à peu près vingt-trois mille. Pour trouver mieux en ce genre, il faudrait, sur la foi du voyageur Benjamin Bergmann, aller jusqu’à la Dschangariade, épopée des Kalmoucks, divisée en trois cent soixante sections, dont chacune est, dit-on, trois ou quatre fois plus longue que les chants d’Homère. Notez que les Indiens, dans ce Mahâbhârata purement humain, ne daignaient voir qu’un abrégé succinct du Mahâbhârata des dieux, qui avait (on les avait comptés, sans nul doute) tout juste douze millions de vers.
De telles proportions (pour ne parler que de l’édition des vulgaires mortels) excluent nécessairement tout de suite l’hypothèse d’un auteur unique. Si les rhapsodies homériques, les Niebelungen, le Romancero du Cid ont pu être à la rigueur assignés à une famille ou à une série de poètes, ici le doute n’est pas même permis. Il n’y a donc point à s’arrêter à la