bourse renfermant tout ce qu’elle possédait, et lui dit :
Élevez-la comme la fille d’un gentilhomme, et ne lui refusez rien de ce qu’il lui faudra pour qu’elle fasse honneur à son nom, car avant que la bourse soit vide, je vous rapporterai de quoi la remplir.
Elle embrassa ensuite l’enfant, pleura beaucoup, et partit.
Mais trois mois après, on la vit reparaître avec plus d’argent qu’elle n’en avait laissé la première fois. Elle continua à revenir ainsi régulièrement quatre fois par année, et, chaque fois, elle demandait qu’Yvonnette eût des maîtres plus habiles et des robes plus belles.
Elle seule était toujours la même ; vêtue de son pauvre jupon de bure, la quenouille dans la ceinture, et marchant en faisant tourner son fuseau. On se demandait vainement d’où pouvait lui venir ce qu’elle dépensait pour Yvonnette ; à toutes les questions, elle se contentait de sourire, en répondant :
— Dieu a une épargne pour les orphelins.
Cependant l’enfant devint une jeune fille, si savante, si sage et si belle, qu’il n’était bruit d’autre chose dans tout le Bessin. Les plus grandes dames du pays voulaient la connaître, et venaient la visiter au parloir du couvent. Les poëtes normands lui adressaient des vers, les jeunes gentilshommes en tombaient amoureux, et portaient ses couleurs ; enfin, il se trouva une foule de gens qui se déclarèrent ses parents ou ses alliés, et qui en apportèrent les preuves.
Madame de Villers, qui était du nombre, exigea même que la jeune fille vînt passer quelques jours à son château.
Ce fut là qu’Yvonnette rencontra le sieur de Boutteville, un des plus riches seigneurs et des plus accomplis du royaume. Il devint si éperdument amoureux de la jeune fille, qu’il la