Page:Souvestre - Le Monde tel qu’il sera, 1859.djvu/37

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ne les pressait plus ; ils pouvaient attendre ; Noiraud n’avait qu’à prendre son temps.

Aussi, quand la route était devenue facile, la mère avait voulu faire marcher ses enfants ; le vieux soldat avait déclaré qu’il ne pourrait demeurer plus longtemps assis sans souffrir de ses blessures, et tous deux descendus, le cocher s’était mis à encourager Noiraud de la voix.

« Ferme, mon vieux trompette ! disait-il ; encore cette corvée pour Georgette ; demain, nous nous reposerons. »

Puis, se tournant vers Marthe et Maurice :

« C’est la fille de la maison, Georgette, avait-il ajouté en souriant ; elle épouse le fils du voisin samedi, et sa mère et moi nous lui avons préparé une surprise ; lit, secrétaire et commode de noyer, avec la garniture de cheminée ! Elle ne se mariera qu’une fois, cette enfant ; je veux qu’elle ait la joie complète. Joli nid et bel oiseau. L’oiseau est trouvé ; mais pour le nid il manque encore cent sous, et Noiraud ne peut se reposer que quand je les aurai… Pas vrai, vieux, que tu me les gagneras demain !

— Il vous les a gagnés, s’était écrié Maurice en lui tendant l’argent ; vous pouvez hâter d’un jour la joie de Georgette et le repos de Noiraud ; allez, brave cœur, et que Dieu bénisse vos amoureux. »

Il avait alors sauté, enlevant Marthe dans ses bras, et la voiture allégée s’était perdue dans l’ombre !

Paris se trouvait encore loin ; mais tous deux avaient marché joyeusement, les bras enlacés, causant à demi-voix de Georgette, de Noiraud, des étoiles ! Ineffable