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cier et ses mamelles de liège verni. Au-dessus se lisait la sainte légende :

Laissez venir vers moi les petits enfants !

Lorsqu’il se présenta au bureau, M. Atout dut indiquer le numéro d’ordre sous lequel son fils avait été inscrit. Le commis feuilleta son catalogue d’enfants, et dit brièvement :

« Salle Jean-Jacques-Rousseau, quatrième rayon, case D. »

L’académicien prit le bras de milady Ennui, et se hasarda à travers les immenses corridors. De loin en loin, des gardiens portant le costume de l’établissement, composé d’un tablier de taffetas ciré et d’une coiffure en forme de biberon, indiquaient aux visiteurs la direction qu’ils devaient prendre. Marthe et Maurice longèrent d’abord une galerie où des métiers de différentes formes tissaient des layettes ; puis une seconde, où d’autres mécaniques fabriquaient de petits cercueils. De là, ils traversèrent une cour pleine de paniers à roulettes, dans lesquels les enfants apprenaient à marcher, et arrivèrent devant un vaste atelier éclairé par la flamme des grands fourneaux.

« Vous voyez les cuisines de l’établissement, dit M. Atout en s’arrêtant ; c’est là que se fabrique le breuvage destiné aux enfants. On avait cru longtemps que l’aliment le plus convenable pour les nouveau-nés était le lait de leur mère ; mais la chimie a démontré qu’il était malsain et peu nourrissant. L’Académie des sciences a, en conséquence, nommé une commission, qui a donné la recette d’un breuvage plus rationnel. Il se compose de quinze parties de gélatine, de vingt-cinq par-