saient d’une grande réputation. Chancer, dans ses contes de Cantorbéry, dit : « Ils fu-
donnant un baiser (*), puis elle le fit asseoir à ses côtés sur un tapis, et commença à l’entretenir avec des paroles et des regards si tendres, qu’il lui fut impossible de n’en pas deviner le motif.
(*) Ce début si démonstratif dans une intrigue amoureuse, n’est pas dans les mœurs des anciens Celto-Bretons, mais pour cela n’en est peut-être pas moins vrai. En effet, la reine dont il s’agit n’était point d’origine celtique, mais romaine, et, s’il faut en croire les historiens, elle était fille du patrice Flavius. On reconnaît le sang d’une Italienne à la manière dont elle exprime sa passion, et ensuite, comme on va voir, à son implacable jalousie.
Mais, à toutes ses avances, Gradlon, pénétré de ce qu’il devait au roi son seigneur, à un prince qui l’avait comblé de bontés, ne répondit que par des expressions respectueuses, et feignit de ne s’apercevoir aucunement des sentimens qui enflammaient le cœur de la princesse.
Celle-ci s’impatienta d’abord ; elle se dépita de ce que le guerrier ne voulait pas la deviner ; se déclarer la première lui paraissait trop humiliant, et Gradlon demeurait froid et glacé auprès d’elle. Pour le porter, de gré ou de force, à lui faire un aveu, elle lui demanda s’il avait une amie, et s’il en était bien aimé, car il méritait, lui dit-elle, de l’être beaucoup. Gradlon lui déclara qu’il n’avait pas encore connu l’amour.
La reine, enchantée de cette assurance, qui, en apparence, flattait sa passion, n’hésita plus à s’y abandonner ; elle s’ouvrit sans réserve au guerrier, et lui avoua que, n’ayant éprouvé jusqu’à ce jour qu’un attachement faible pour le roi son époux, et sentant le besoin d’aimer, elle avait cherché le héros le plus accompli, et qu’elle croyait enfin l’avoir trouvé dans la personne du vaillant Gradlon.