l’avenir, c’est que M. de Mondoville ne quittera point sa femme pendant sa grossesse ; ainsi nous avons du temps pour prévenir de nouveaux malheurs.
Voilà, mademoiselle, tout ce que j’ai recueilli qui puisse intéresser notre amie ; c’est à vous à juger de ce qu’il faut lui dire ou lui cacher ; parlez-lui du moins de l’inaltérable attachement que M. de Lebensei et moi lui avons consacré, et daignez agréer aussi, mademoiselle, l’hommage de nos sentiments.
Je partage du fond de mon cœur, mon amie, l’émotion que cette lettre vous aura causée ; mais, je vous en conjure, ne vous laissez pas ébranler dans vos généreuses résolutions ; puisque vous avez pu partir, attendez que le temps ait changé la nature de vos sentiments ; un jour Léonce sera votre ami, votre meilleur ami, et l’estime même que votre conduite lui aura inspirée consacrera son attachement pour vous.
J’ai regretté d’abord vivement que vous eussiez pris le parti de ne pas me rejoindre, mais à présent je l’approuve ; Léonce serait venu certainement ici s’il avait su que vous y fussiez, et M. de Valorbe n’aurait pas perdu un moment pour se rapprocher de vous et vous persécuter peut-être d’une manière cruelle. Dérobez-vous donc en ce moment aux dangereux sentiments que vos charmes ont inspirés ; mais songez que vous devez un jour vous réunir à moi, et qu’il ne vous est pas permis de vous séparer de celle qui n’a d’autre intérêt dans ce monde que son attachement pour vous.
Que de larmes j’ai versées en lisant la lettre de madame de Lebensei ! Cependant, ma chère Louise, elle m’a fait du bien, je suis plus calme qu’avant de l’avoir reçue ; j’ai été profondément touchée de cette ressemblance, de cette harmonie de sentiments et d’expressions, que la douleur même a fait naître entre Léonce et moi. Ah ! nos âmes avaient été créées l’une pour l’autre ; si nous différions.quelquefois au milieu de la société, les fortes affections de l’âme, les cruelles peines du cœur font sur nous deux des impressions presque les mêmes.