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Page:Staël - Réflexions sur le procès de la Reine, 1793.pdf/18

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le 10. Août, lorsqu’il fut proposé de se défendre en exposant le sang des Français, la Reine n’écouta plus que les sentimens d’une femme, la sollicitude d’une mère, et ne redevint un héros qu’au moment où l’on menaça sa propre vie. Vous qui l’avez vu regarder ses enfans, vous qui sçavez que nul péril ne put la résoudre à se séparer de son époux, alors que tant de fois les chemins lui furent ouverts pour retourner dans sa Patrie, croyez-vous que son cœur étoit barbare ou tyrannique ? Ah ! qui sait aimer n’a jamais fait souffrir, qui peut être puni dans l’objet qu’il chérit redoute la vengeance céleste ; oui, si parmi les Juges de Marie Antoinette, il en est un qui soit père, qui ressente une affection douce, il sera juste et courageux, à travers les calomnies que l’on apprête, l’instinct de l’ame lui fera découvrir la vérité, et des souvenirs et des rapprochemens sensibles le rendront incapable d’achever un tel malheur.

Mais de quelle ruse ne se sert pas la haine, elle sçait comme l’amour tout ce qui peut émouvoir, et d’avance elle prévient tous les effets de la vérité, elle cherche bassement à déjouer le respect, l’intérêt que doit inspirer la Reine, par ce genre de calomnie dont il est si facile de flétrir toutes les femmes, par ce genre de calomnie dont l’injus-