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Page:Staël - Réflexions sur le procès de la Reine, 1793.pdf/23

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aussi donneroient peut-être à cet attentat une plus haute importance politique, mais ces considérations sont faites pour ne frapper que le petit nombre, et le dernier terme de toutes les idées qui peuvent émouvoir le Peuple, se trouvoit dans l’exécution du Roi. La condamnation de la Reine seroit donc un crime inutile et par cela même plus avilissant, on y verroit ou le besoin de la férocité ou la terreur panique du remords. Imagineroit-on de redoubler le courage du Peuple en l’enyvrant du sang d’une nouvelle victime, mais cette affreuse ressource est maintenant épuisée, soit qu’on ait tellement accoutumé à l’idée de la mort que la prodiguer encore n’exciteroit plus aucun genre d’émotion, soit que toutes les ames absorbées par l’intérêt de leur propre malheur ne puissent plus s’agiter au nom même de la vengeance. Voudroit-on enfin donner au Peuple une plus grande confiance dans la situation des affaires en se décidant à prendre une résolution plus dangereuse que toutes les autres, mais combien ce calcul seroit faux, ce qui suppose le calme, c’est la sagesse des délibérations, mais tous les excès sont également une preuve du trouble de l’ame, et c’est la raison seule qui tout à la fois, ou préserve des périls, ou témoigne qu’on a cessé de