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pas cinq ans encore, et alors toute sa vie politique, tout ce qui lui a mérité l’amour ou la haine étoit écoulé, il n’y a pas cinq ans, et j’ai vu tout Paris se précipiter sur ses pas avec transport, ces mêmes routes qu’on lui fait parcourir de supplice en supplice, étoient jonchées de fleurs sur son passage, elle doit reconnoître les mêmes traits qui l’ont accueillie, les mêmes voix qui s’élevoient au Ciel en l’implorant pour elle. Et depuis ce tems qu’est-il arrivé ? Son courage et son malheur. Cet enthousiasme dont le souvenir ajoute à l’amertume de sa destinée, cet enthousiasme dont le souvenir aussi doit inquiéter les Français et les rendre douteux de leurs nouveaux jugemens, ne pourroit décider l’opinion de l’Europe sur la Reine, mais en écartant même le respect profond qu’inspire son auguste infortune, au nom seul de la vérité, il est ordonné de dire que personne ne différe autant qu’elle de la réputation que ses ennemis ont tenté de lui donner, on n’a pas même cherché la vraisemblance dans le mensonge, tant on a compté sur l’envie, tant elle sçait répondre à l’affreuse attente des calomniateurs.

La Reine ne s’est d’abord occupée des affaires, que pour accomplir quelques actes de bienfaisance ou de générosité, on a quelquefois trouvé quelle