Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/139

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dinand lui avait adressée le jour même de son arrivée à Florence.

« Si j’étais à votre place », lui avait dit le comte, « j’abdiquerais aussitôt ; jugez si je voudrais être le ministre d’un prince et ameuter contre moi les haines de la moitié des habitants d’une ville où je compte passer ma vie ! »

Au milieu des embarras de cour que les dissensions du couvent de Sainte Riparata donnaient au grand-duc, il pensa qu’il pouvait avoir recours à l’amitié du comte. Celui-ci passait sa vie dans ses terres, dont il dirigeait la culture avec beaucoup d’application. Chaque jour il donnait deux heures à la chasse ou à la pêche, suivant les saisons et jamais on ne lui avait connu de maîtresse. Il fut fort contrarié de la lettre du prince qui l’appelait à Florence ; il le fut bien davantage, quand le prince lui eut dit qu’il voulait le faire directeur du noble couvent de Sainte Riparata.

« Sachez », lui dit le comte, « que j’aimerais presque encore mieux être premier ministre de Votre Altesse. La paix de l’âme est mon idole, et que voulez-vous que je devienne au milieu de toutes ces brebis enragées ?

— Ce qui m’a fait jeter les yeux sur vous, mon ami, c’est que l’on sait que