Page:Stendhal - Chroniques italiennes, II, 1929, éd. Martineau.djvu/166

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

belles que les siennes ». Félize soutenait l’abbesse à demi évanouie d’horreur.

Quelques instants après, la malheureuse Fabienne entrait au jardin, soutenant son malheureux amant Pierre-Antoine, lui aussi percé de coups mortels. Lui aussi ne tarda pas à expirer, mais, au milieu du silence général inspiré par cette scène d’horreur, on l’entendit qui disait à Fabienne :

« C’est Don César, le chevalier de Malte. Je l’ai bien reconnu, mais s’il m’a blessé, lui aussi porte mes marques. »

Don César avait été le prédécesseur de Pierre-Antoine auprès de Fabienne. Cette jeune religieuse semblait avoir perdu tout soin de sa réputation ; elle appelait à haute voix à son secours la Madone et sa sainte Patronne, elle appelait aussi sa camériste noble, elle n’avait aucun souci de réveiller tout le couvent ; c’est qu’elle était réellement éprise de Pierre-Antoine. Elle voulait lui donner des soins, étancher son sang, bander ses plaies. Cette véritable passion excita la pitié de beaucoup de religieuses. On s’approcha du blessé, on alla chercher des lumières, il était assis auprès d’un laurier contre lequel il s’appuyait. Fabienne était à genoux devant lui, lui donnant des soins. Il parlait bien et racontait de nouveau que c’était Don