Page:Stendhal - Chroniques italiennes, Lévy, 1855.djvu/172

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et contre Félix, cardinal Montalto, jamais il ne lui pardonnerait ce qu’à l’avenir il pourrait faire contre le pape Sixte ; qu’en conséquence il l’engageait à aller sur-le-champ expulser de sa maison et des États tous les brigands (exilés) et les malfaiteurs auxquels, jusqu’au présent moment, il avait donné asile.

Sixte-Quint avait une efficacité singulière, de quelque ton qu’il voulût se servir en parlant ; mais, quand il était irrité et menaçant, on eût dit que ses yeux lançaient la foudre. Ce qu’il y a de certain, c’est que le prince Paul Orsini, accoutumé de tout temps à être craint des papes, fut porté à penser si sérieusement à ses affaires par cette façon de parler du pape, telle qu’il n’avait rien entendu de semblable pendant l’espace de treize ans, qu’à peine sorti du palais de Sa Sainteté il courut chez le cardinal de Médicis lui raconter ce qui venait de se passer. Puis il résolut, par le conseil du cardinal, de congédier, sans le moindre délai, tous ces hommes repris de justice auxquels il donnait asile dans son palais et dans ses États, et il songea au plus vite à trouver quelque prétexte honnête pour sortir immédiatement des pays soumis au pouvoir de ce pontife si résolu.

Il faut savoir que le prince Paul Orsini était devenu d’une grosseur extraordinaire ; ses jambes étaient plus grosses que le corps d’un homme ordinaire, et une de ces jambes énormes était affligée du mal nommé la lupa (la louve), ainsi appelé parce qu’il faut la nourrir avec une grande abondance de viande fraîche qu’on applique sur la partie affectée ; autrement l’humeur violente, ne