Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/116

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l’attribuer ! Le prince est outré, et je ne sais pourquoi, contre la Sanseverina (trois jours auparavant le Rassi eût dit la duchesse, mais, comme toute la ville, il savait la rupture avec le premier ministre) ; le comte fut frappé de la suppression du titre dans une telle bouche, et l’on peut juger du plaisir qu’elle lui fit ; il lança au Rassi un regard chargé de la plus vive haine. Mon cher ange ! se dit-il ensuite, je ne puis te montrer mon amour qu’en obéissant aveuglément à tes ordres.

— Je vous avouerai, dit-il au fiscal, que je ne prends pas un intérêt bien passionné aux divers caprices de madame la duchesse ; toutefois, comme elle m’avait présenté ce mauvais sujet de Fabrice, qui aurait bien dû rester à Naples, et ne pas venir ici embrouiller nos affaires je tiens à ce qu’il ne soit pas mis à mort de mon temps, et je veux bien vous donner ma parole que vous serez baron dans les huit jours qui suivront sa sortie de prison.

— En ce cas, monsieur le comte, je ne serai baron que dans douze années révolues, car le prince est furieux, et sa haine contre la duchesse est tellement vive, qu’il cherche à la cacher.

— Son Altesse est bien bonne ! qu’a-t-elle besoin de cacher sa haine, puisque son premier ministre ne protège plus la