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Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 2), 1883.djvu/206

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passer à l’instant chez elle. Le comte, ravi comme un amoureux de cette apparence d’intimité, hésitait cependant à tout dire à la duchesse ; il craignait de la voir devenir folle de douleur.

Après avoir cherché des demi-mots pour mitiger l’annonce fatale, il finit cependant par lui tout dire ; il n’était pas en son pouvoir de garder un secret qu’elle lui demandait. Depuis neuf mois le malheur extrême avait eu une grande influence sur cette âme ardente, elle l’avait fortifiée, et la duchesse ne s’emporta point en sanglots ou en plaintes.

Le lendemain soir elle fit faire à Fabrice le signal du grand péril :

Le feu a pris au château.

Il répondit fort bien :

Mes livres sont-ils brûlés ?

La même nuit elle eut le bonheur de lui faire parvenir une lettre dans une balle de plomb. Ce fut huit jours après qu’eut lieu le mariage de la sœur du marquis Crescenzi, où la duchesse commit une énorme imprudence dont nous rendrons compte en son lieu.