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tandis que le comte, moins délicat, a fait toutes les campagnes d’Espagne, ce qu’on lui a souvent reproché à la cour.

La duchesse avait ouvert la lettre du comte, mais en interrompait la lecture pour faire cent questions à Bruno.

La lettre était bien plaisante ; le comte employait les termes les plus lugubres, et cependant la joie la plus vive éclatait à chaque mot ; il évitait les détails sur le genre de mort du prince, et finissait sa lettre par ces mots :


« Tu vas revenir sans doute, mon cher ange ! mais je te conseille d’attendre un jour ou deux le courrier que la princesse t’enverra, à ce que j’espère, aujourd’hui ou demain ; il faut que ton retour soit magnifique comme ton départ a été hardi. Quant au grand criminel qui est auprès de toi, je compte bien le faire juger par douze juges appelés de toutes les parties de cet État. Mais, pour faire punir ce monstre-là comme il le mérite, il faut d’abord que je puisse faire des papillotes avec la première sentence, si elle existe. »


Le comte avait rouvert sa lettre :


« Voici bien une autre affaire : je viens de faire distribuer des cartouches aux deux bataillons