Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/56

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tellement l’éloquence du curé, qu’il s’aperçut que les femmes quittaient en foule le cimetière, et il fut obligé de couper court à son homélie pour n’être pas abandonné.

Une heure après, je trouvai le terrible curé faisant une scène horrible à un jeune abbé nommé Lamairette, précepteur de Fédor, et lui demandant aigrement pourquoi, à l’église, il s’était séparé de son élève.

— C’est bien plutôt lui, monsieur, qui s’est séparé de moi, répondit timidement le pauvre abbé ; je le cherchais partout, et lui, qui me voyait apparemment, mettait tous ses soins à m’éviter.

L’abbé Du Saillard tança vertement le pauvre jeune prêtre Lamairette et finit par le menacer de la déplaisante colère de Mme la duchesse.

— Vous m’ôterez le pain, dit timidement le pauvre Lamairette ; mais, en vérité, au milieu de vos réprimandes et de celles de Mme la duchesse, je ne sais à quel saint me vouer. Est-ce ma faute, à moi, si le petit comte, auquel son valet de chambre répète toute la journée qu’un jour il sera duc, avec une fortune immense, est un enfant espiègle qui met toute sa vanité à se moquer de moi ?