Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/85

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à cet âge, quand il ne tient pas à la souffrance physique, annonce la présence de l’âme. Mme Hautemare trouvait du péché à la moindre distraction, le dimanche, par exemple, non seulement il ne fallait pas aller voir la danse sous les grands tilleuls au bout du cimetière, mais même il ne fallait pas s’asseoir devant la porte de la chaumière que la commune passait au marguillier, car de là on entendait le violon, et l’on pouvait apercevoir un coin de cette danse maudite qui rendait jaune le teint de M. le curé. Lamiel pleurait d’ennui, pour la calmer, la bonne tante Hautemare lui donnait des confitures, et la petite, qui était friande, ne pouvait la prendre en déplaisance. De son côté, le maître d’école Hautemare, fort scrupuleux sur ce devoir, la forçait à lire une heure le matin et une heure le soir.

— Si la commune me paye, se disait-il, pour enseigner à lire à tous les enfants généralement quelconques, à plus forte raison dois-je enseigner à lire à ma propre nièce, puisque, après Dieu, je suis la cause de sa venue en cette commune.

Cette lecture continuelle était un des supplices de la petite fille, mais quand le bon maître d’école la voyait pleurer, il lui donnait quelque monnaie pour la consoler. Malgré cet argent, bien vite échangé contre