Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/86

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de petits bonshommes de pain d’épices, Lamiel abhorrait la lecture.

Un jour de dimanche, que l’on ne pouvait pas filer et que sa tante lui défendait de regarder par la porte ouverte, de peur qu’elle n’aperçût dans le lointain quelque coiffe sautant en cadence, Lamiel trouva sur l’étagère de livres l’Histoire des quatre fils Aymon. La gravure sur bois la charma, puis, pour la mieux comprendre, elle jeta les yeux, quoique avec dégoût, sur la première page du livre. Cette page l’amusa, elle oublia qu’il lui était défendu d’aller voir la danse, bientôt elle ne put plus penser qu’aux quatre fils Aymon… Ce livre, confisqué par Hautemare à un écolier libertin, fit des ravages incroyables dans l’âme de la petite fille. Lamiel pensa à ces grands personnages et à leur cheval toute la soirée et puis toute la nuit. Quoique fort innocente, elle pensait que ce serait bien autre chose de se promener dans le cimetière, tout à côté de la danse, en donnant le bras à un des quatre fils Aymon, au lieu d’être retenue et empêchée de sauter par le bras tremblant de son vieil oncle. Elle lut presque tous les livres du maître d’école avec un plaisir fou, quoique n’y comprenant pas grand chose ; mais elle jouissait des imaginations qu’ils lui donnaient. Elle dévora, par exemple, à cause des