Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/273

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entrevue avec M. Brémont père qui est venu passer huit jours à Paris pour voir la divine Elssler, et qui ne songe ni à son monstre de fils ni à payer ses dettes.

Rien ne peut désunir Brémont et Saint-Vernange. Dans le voyage en Espagne, Saint-Vernange a eu les bonnes fortunes les plus extraordinaires. Il faut convenir qu’il est admirablement bien fait ; grand, leste, hardi, des cheveux blonds, la figure la plus douce et la plus aimable. Qui le croirait un tel monstre ? Il ne connaît pas plus la peur que le sentiment.

— Quand j’ai l’honneur d’embrasser ces belles dames, disait-il à Brémont, je ne puis penser qu’aux beaux diamants qui forment leurs pendants d’oreilles.

— Dans tout ce voyage d’Espagne, ajoute Brémont, nous faisions la cour à une dame ; Pétrone plaisait, et dès le troisième jour, régulièrement, j’étais éconduit ; mais il s’arrangeait bientôt pour avoir un rendez-vous dans l’obscurité, et ce n’était pas lui qui s’y présentait.

— Dites-nous, Pétrone, combien de fois vous êtes-vous battu en Espagne ?

— Trois fois, mais de petits duels à l’épée, peu dangereux.

— Et sur les trois fois, reprend Brémont il s’est battu deux pour moi ; rien de plus commode.