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New-York ; mais, dans ce pays si moral, en peu de mois l’ennui mettrait fin à mon existence.

En 1823, je fus à Naples avec un homme de bon sens, qui passait son temps à avoir peur qu’on ne lui volât dix-huit chemises qu’il avait dans sa valise. Nous nous sommes affranchis de ces tristes sensations : nous avons fort peu d’argent et des montres de trente-six francs ; nous ne fermons rien à clef. Ces précautions sont toujours de mise dans les pays sauvages. En Angleterre, on nous estimait d’après la beauté de la montre et des bijoux d’or déposés sur le somno. Les souverains qui paraissaient dans notre bourse, augmentaient évidemment notre considération. C’est que, dans les pays aristocratiques, il faut montrer la richesse, et la cacher ici. C’est par l’oubli de ces précautions qu’un grand nombre d’Anglais se font voler en Italie. Quelquefois, comme ce beau jeune homme tué près de Naples avec sa femme, ils se piquent d’honneur contre les brigands et font feu avec des pistolets de poche sur quatre ou cinq voleurs bien armés.

Le génie anglais est de lutter contre les obstacles. Nous, Français, qui n’avons pas ce mérite, sommes convenus de rire des petits vols, au lieu de faire une scène dans