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SECONDE PARTIE

dramatique qu’il faut aller chercher au théâtre, et non pas le plaisir épique d’entendre réciter de beaux vers bien ronflants, et que d’avance l’on sait par cœur, comme le dit naïvement M. Duviquet[1].

À l’insu de tout le monde, le romantisme a fait d’immenses progrès depuis un an. Les esprits généreux, désespérant de la politique depuis les dernières élections, se sont jetés dans la littérature. Ils y ont porté de la raison, et voilà le grand chagrin des hommes de lettres.

Les ennemis de la tragédie nationale en prose ou du romantisme (car, comme M. Auger, je n’ai parlé que du théâtre[2]) sont de quatre espèces :

1o Les vieux rhéteurs classiques, autrefois collègues et rivaux des Laharpe, des Geoffroy, des Aubert ;

2o Les membres de l’Académie française, qui, par la splendeur de leur titre, se croient obligés à se montrer les dignes successeurs des impuissants en colère qui jadis critiquèrent le Cid ;

3o Les auteurs qui, au moyen de tragédies en vers, font de l’argent, et ceux qui, par leurs tragédies et malgré les sifflets, obtiennent des pensions.

  1. Journal des Débats du 8 juillet 1818.
  2. Page 7 du Manifeste.