Page:Stendhal - Racine et Shakespeare.djvu/179

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
142
RACINE ET SHAKSPEARE

Les plus heureux de ces poëtes, ceux que le public applaudit, étant en même temps journalistes libéraux, disposent du sort des premières représentations, et ne souffriront jamais l’apparition d’ouvrages plus intéressants que les leurs ;

4o Les moins redoutables des ennemis de la tragédie nationale en prose, telle que Charles VII et les Anglais, les Jacques bons Hommes, Bouchard et les Moines de Saint-Denis, Charles IX, sont les poëtes associés des bonnes-lettres. Quoique fort ennemis de la prose en leur qualité de fabricants de vers à l’usage de l’hôtel de Rambouillet, et détestant surtout une prose simple, correcte, sans ambition, modelée sur celle de Voltaire, ils ne peuvent sans se contredire eux-mêmes s’opposer à l’apparition d’une tragédie qui tirera ses principaux effets des passions violentes et des mœurs terribles du moyen âge. Comme bons hommes de lettres, présidés par M. de Chateaubriand, ils n’oseraient proscrire, de peur de fâcher leurs nobles patrons, un système de tragédie qui nous entretiendra des grands noms des Montmorency, des la Trimouille, des Crillon, des Lautrec, et qui remettra sous les yeux du peuple les actions féroces, il est vrai, mais grandes et généreuses, autant qu’on pouvait l’être au douzième siècle,