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LE ROSE ET LE VERT

le duché pour vous, et peu à peu l’enveloppe s’est unie à la chair et votre cœur commence à être lignifié.

Le duc se met à parler, d’abord mal, puis bien, puis très bien. Se trouvant élevé hors de son horizon de duc, son œil charmé découvre un horizon immense, gai, nouveau. Sa joie. Il devient un autre être.

— Vous avez fait ma métamorphose, dit-il à Mina.

Il l’aime.

Elle l’aime.

Mina devient triste, une aventure de la société la porte à penser : « Ceci tend à me séduire, qui sait s’il m’aime. »

Malheureusement Léon avec sa nouvelle éloquence cita un jour ce vers :


Si vis amari, ama.


Ce vers acheva Mina.

[Alors elle imagine de donner à Léon un écritoire de bronze, mais elle place dans un double fond le verso d’une lettre de Léon à elle-même où elle écrit : « Excusez mon mensonge, je vais vous dire une odieuse fausseté, mais ce terrible spectre de mon imagination : être épousée pour les millions, me poursuit… j’ai eu un enfant… » Puis elle lui fait enfouir cet écritoire au fond d’une muraille.]