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ROMANS ET NOUVELLES

« Dieu me pardonne, il veut me tuer, se dit Saint-Ismier. Ici, il faut du sang-froid. » Saint-Ismier rompit à plusieurs reprises, parce que le gentilhomme qui suivait te comte avait tiré son épée, et s’était placé à sa droite et cherchait aussi à piquer le chevalier.

« Décidément, ils vont me tuer », se disait celui-ci en rompant encore une fois, lorsqu’il profita de l’imprudence du comte qui se jetait sur lui, pour lui lancer un coup d’épée dans la poitrine. Le comte para le coup en relevant l’épée du chevalier qui lui entra dans l’œil droit, pénétra de six pouces ; et le chevalier sentit son fer arrêté par quelque chose de dur ; c’était l’os de l’intérieur du crâne. Le comte tomba mort.

Comme le chevalier, fort étonné de ce résultat, tarda un peu à retirer son épée, l’homme qui était derrière le comte, lui donna un grand coup d’épée dans le bras, et à l’instant le chevalier sentit une quantité de sang chaud qui lui coulait le long du bras. Depuis un quart de minute, cet homme, qui venait de blesser le chevalier, criait au secours de toutes ses forces. Huit ou dix personnes sortirent de l’auberge, car c’était une auberge et la première de Bordeaux. Saint-Ismier remarqua fort bien que quatre ou cinq de ces personnes