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Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/66

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ROMANS ET NOUVELLES

qu’à la porte de quelque petite auberge, et, là, je cesserai de réclamer les soins d’un homme généreux et vous prierai d’abandonner une malheureuse.

Tout cela, dit en mauvais français, plut assez à Liéven.

— Madame, répondit-il, je vais faire tout ce que vous m’ordonnez. L’essentiel cependant pour vous et pour moi, c’est de ne pas nous faire arrêter. Je m’appelle Liéven, lieutenant au 96e régiment ; si nous rencontrons une patrouille, et qu’elle ne soit pas de mon régiment, on nous mène au corps de garde, où il faudra passer la nuit, et, demain, vous et moi, madame, serons la fable de Bordeaux.

Liéven sentit frémir Léonor, à qui il donnait le bras.

— Cette horreur du scandale est de bon augure, pensa-t-il. — Daignez prendre ma redingote, dit-il à la dame ; je vais vous conduire jusque chez moi.

— Ô ciel ! monsieur !…

— Je n’allumerai pas de lumière, je vous le jure sur l’honneur. Je vous laisserai maîtresse absolue dans ma chambre, et ne reparaîtrai que demain matin. Il le faut, car à six heures arrive mon sergent, qui est homme à frapper jusqu’à ce qu’on lui ouvre. Vous avez affaire à un homme